Notre communication s'inscrit dans le cadre d'une thèse en sciences de l'éducation et de la formation menée, depuis 2014, sous la direction de Georges-Louis Baron et Emmanuelle Voulgre (université Paris Descartes, laboratoire EDA). Elle vise à comprendre comment des collégiens, équipés individuellement en matériels informatiques, reçoivent et s'approprient les cultures numériques qui leurs sont transmises dans le milieu scolaire.
Le système scolaire n'échappe ni aux bouleversements liés à ce que certains nomment la « révolution numérique », ni aux débats qu'elle soulève. Force est de constater que le numérique est devenu un « domaine de formation et de culture » (Baron, 2017; Martinand, 2016). Il est, en effet, pris en considération aussi bien par les politiques nationales que locales œuvrant « au développement d'une [...] culture numérique » (MEN, 2015).
Depuis 2012, une opération massive visant à équiper chaque collégien en matériels informatiques a été mise en œuvre, dans le département du Val-de-Marne, à l'initiative du conseil départemental en partenariat avec l'académie de Créteil. Tous les élèves ont ainsi pu en bénéficier, dès leur entrée en 6e jusqu'à la fin de leur 3e, pour une utilisation en classe et à la maison (Pauty-Combemorel & Baron, 2017).
En nous appuyant sur les observations faites dans deux collèges du Val-de-Marne entre 2013 et 2016, nous nous focalisons ici sur les cultures numériques scolaires. Nous les définissons comme l'ensemble des connaissances, des valeurs et des croyances qui sont véhiculées et partagées par les acteurs de l'environnement scolaire. Dans le cas présent, il s'agit de la classe. Nous posons les questions suivantes : comment sont-elles transmises durant des activités instrumentées en classe par les enseignants aux élèves ? Quelles sont les règles de fonctionnement qui sont mises en œuvre pour organiser le travail scolaire des élèves ?
Les recherches ont montré que si les élèves avaient des habiletés manipulatoires indéniables dans l'utilisation des technologies numériques, ils savaient en revanche mal conceptualiser leurs actions en les nommant. Nos résultats indiquent que si l'utilisation des technologies numériques figure parmi les préoccupations de tous les acteurs de la chaîne de prescription, les manipulations faites en classe demeurent pourtant limitées à certaines fonctionnalités. Les enseignants insistent sur les manipulations techniques à opérer, en décrivant « pas à pas » chaque procédure, plutôt que sur la compréhension des concepts informatiques ou informationnels sous-jacents. Pourtant, les élèves développent aussi bien des savoirs disciplinaires que numériques alors que ces derniers ne figurent pas parmi les objectifs principaux de leurs enseignants.